FRANCOIS AU PAYS DE MAYOTTE
François en vacances (ou François au pays de Mayotte)
Aujourd’hui 11 juillet 2009, c’est un grand jour pour le petit François. Il va visiter le pays de Mayotte. Moi, j’y suis déjà parce que j’y habite. Alors, vous me connaissez, je me suis plantée au bord de la rue avec mon petit drapeau bleu, blanc, rouge, pour l’accueillir. C’était tout beau autour de moi : la veille, l’armada des bouenis (les dames mahoraises) avaient tout bien nettoyé. Je les revois encore hier avec leurs balais de fortune -c’est bien leur seule fortune d’ailleurs- pousser tous les détritus dans des coins cachés, sous les branches derrière les palissades ou dans les fossés. Donc ce jour, foin des papiers en tous genres, foin des canettes, foin des crottes de zébu. Y avait plus rien que les jolis étendards de la république française qui flottaient au vent léger de l’hiver tropical. Pour un peu, on se serait cru dans les quartiers populaires de la banlieue de Neuilly, mais en plus exotique quand même. Faut dire aussi que je vous parle de la rue résidentielle de mon coin, celle où je n’habite pas.
Tout y était beau pour faire plaisir au petit François, pour qu’il se sente vraiment en vacances, mais en même temps chez lui : les bananiers pleins de bananes, les grosses voitures modernes rutilantes (des belles Renault pour lui faire plaisir), les maisons typiques ornées de l’étendard national français, et la population enjouée. Un vrai club Med entretenu par la France (A gadoue dou dou -non pas de gadoue aujourd’hui). Tout au long de ses déplacements, on chantait, on était heureux : les femmes avaient revêtu leurs plus belles robes locales, ces jolis lambs aux couleurs chatoyantes et aux motifs variés qui auraient redonné la joie de vivre à n’importe quel condamné à mort. Les malicieuses petites filles heureuses de cette kermesse inhabituelle faisaient virevolter leurs éclatantes tenues blanches tandis que les jeunes garçons fripons laissaient éclater la blancheur de leur sourire. Oui, vraiment, tout y était beau dans le pays de Mayotte.
Et je ne vous parle pas des autres, les policiers, les douaniers, les gendarmes, les militaires, les vigiles, les gardes du corps, tous plus décorés que mon dernier sapin de Noël, et les mecs des renseignements généraux en planque qu’on faisait semblant de ne pas voir.
Cerise sur le gâteau, notre ministre, le petit François (mais oui c’est le Premier ministre) il a eu droit à la présentation des lauréats avec mention du bac et du brevet : y devaient être rudement fiers les enfants de militaires et de profs ! Et notre ministre, le 1er, il a dû rudement s’ennuyer, mais bon c’est son job. Alors, le gentil François, tout enthousiaste et se laissant griser par l’atmosphère généreuse de ce joli coin de paradis, pour les remercier de cet accueil si chaleureux et si véridique, y alla de sa contribution dévouée et surtout désintéressée et promit 6 millions d’Euros aux Gentils Organisateurs locaux. Je reste ébahie par tant de bonté et d’altruisme car je sais que cet argent ne restera pas inexploité. Je préfère que nous en parlions de vive voix car comme vous le savez les voies de l’internet ne sont pas impénétrables.
Hélas, tous les bons moments ont une fin. Fort malencontreusement, un avion a eu la malheureuse idée de se planter aux Comores la semaine dernière, et notre petit François a dû écourter sa visite à Mayotte pour aller les consoler.
En fin de journée il est parti le petit François, et moi j’ai rangé mon petit drapeau et je suis rentrée dans ma cabane dans mon quartier insalubre.